En 2009 nous souhaitons compléter l'exploration de la magnifique région d'Upernavik. Notre projet est de naviguer entre les îles situées à l'est et au sud, en faisant quelques randonnées à proximité de la calotte qui nous avait éblouis il y a deux ans.
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Enthousiasmés par le raid en kayak effectué en 2007 au nord d'Upernavik, nous revenons cette année pour explorer les îles du sud et de l'est. Malheureusement, aucun de nos amis n'a pu se libérer assez longtemps pour nous accompagner dans cette visite. Nous avons donc effectué cette traversée à deux avec notre kayak biplace Nautiraid. La principale difficulté d'un raid en autonomie à deux consiste à monter tous les soirs un kayak chargé pesant plus de 100kg à plusieurs mètres au-dessus de la mer. Le chariot à roulettes que nous avons emmené pour faciliter le transport du kayak s'est brisé dès le deuxième jour, nous avons donc été contraints de décharger le kayak tous les soirs pour le recharger tous les matins. C'est un peu fastidieux au début mais le kayak s'allège au fil des jours.
Sur la côte est de l'île d'Ipéraq. En face, la côte ouest de Kangeq. 25 août 2009.
Transport et matériel
Upernavik est desservi par une ligne aérienne régulière qui permet de rejoindre le village dans la journée depuis Copenhague. Pour acheminer le matériel, nous utilisons le fret maritime de la compagnie Royal Arctic Line, basée au port danois de Aalborg. Les caisses parties de France en juin nous attendent à Upernavik à notre arrivée. Pour le détail du matériel et du transport, voir le chapitre «Kayak de mer au Groenland».
Cartographie et orientation
Voir le chapitre «Kayak de mer au Groenland». Pour les cartes Sagamaps, feuille N°14 (Upernavik). Pour la première édition, feuille (Upernavik).
Le carnet de route
Béatrice navigue devant le camp 20 le 20 août 2009. En face, la côte ouest d'Akuliaruseq.
26 au 28 juillet – Préparatifs à Upernavik
Arrivés à Upernavik le samedi 25 juillet, nous devons attendre lundi l'ouverture de la Royal Arctic. Installation du camp au bord de la mer et visite du village que nous retrouvons avec plaisir. Après avoir récupéré le matériel et le kayak auprès de la Royal Arctic, celle-ci accepte gentiment de livrer les caisses à notre camp et de les garder jusqu'à notre retour quand elles seront vides.
Le kayak est monté au bord de la mer, puis le carburant pour le réchaud est acheté et conditionné avec soin, car une fuite d'essence dans le kayak serait désastreuse. Nous faisons ensuite un petit tour en kayak pour les ultimes réglages du gouvernail, des sièges et des pédales avant de tester le chariot à roulettes qui semble fonctionner. Après avoir consacré la demi-journée règlementaire au chargement du kayak, nous sommes prêts.
La Royal Arctic dépose nos caisses devant la tente - 27 Juillet 2009
Le détroit d'Angmarqa vu de la balade au-dessus du camp 20 le 21 août 2009.
29 juillet au 1er août - L'île Nutarmiut
Le 29 juillet, nous quittons Upernavik vers l'est. Très beau temps, mer d'huile et magnifique passage dans les icebergs avant le premier camp . Nous constatons dès le premier soir qu'il n'est pas facile, même avec les roulettes, de remonter le kayak au milieu des cailloux.
Le lendemain, après une journée paisible, un camp facile d'accès avec l'eau courante est établi. Cependant, la montée du kayak au-dessus de l'eau se termine mal, une des deux roulettes de notre chariot s'étant brisée. Nous allons donc devoir vider le kayak tous les soirs et le recharger tous les matins afin de le sortir de l'eau pour le monter assez haut.
C'est un peu rude mais nous n'avons pas d'autre choix. Le kayak s'allègeant d'environ 2kg par jour, la situation ne peut que s'améliorer !
Deux jours de temps calme et de beauté paisible avec de très nombreux oiseaux, des phoques et des cormorans nous conduisent au fond du fjord Amitsoq où est installé un camp un peu décevant car il n'y a pas d'eau et des moustiques.
Autour du camp 15 - 14 août 2009
2 au 6 août - Icebergs et calotte de glace
Vue du front de la calotte de glace depuis la balade effectuée au-dessus du camp 7 - 5 Août 2009
Iceberg dans l'Upernavik Isfjord devant le camp 5 le 2 août 2009.
Nous quittons le fjord et, à la sortie, la navigation au bord de l'Upernavik Isfjord* est magique: des icebergs flottent sur une eau parfaitement calme et on a la sensation de slalomer sur un miroir. La journée s'achève à un camp splendide, avec une dalle de granite légèrement inclinée pour monter le kayak. Un jeune renard s'invite au dîner. Après quelques photos, nous le chassons afin de préserver les ficelles de notre tente qui l'intéressaient un peu trop.
Le lendemain, après deux heures sublimes dans les icebergs face à la calotte, nous obliquons vers le sud pour gagner l'île Uilortussoq. Tout va bien sauf les insectes, nombreux au camp. Celui-ci est sympathique, un petit ruisseau bien caché dans l'herbe est découvert à l'oreille et nous évite de partir à la chasse aux glaçons. Nous n'avons vu personne depuis Upernavik.
Vue sur l'Isfjord depuis le camp 5 - 3 Août 2009
Autour du camp 5 - 2 Août 2009
Le beau temps calme persiste mais les mouches et moustiques persistent aussi dès que l'on s'arrête. Visite du fjord Taserssuatsiaq et camp dressé près d'un petit lac, assez loin au-dessus de la mer. Le lendemain, une longue randonnée à travers la péninsule Taserssuatsiaup nous permet de gagner un plateau de 4 ou 500m d'altitude dominant la calotte et son contact avec l'Upernavik Isfjord. Fabuleux spectacle.
Nous retrouvons ici les émotions esthétiques que nous avions connues il y a deux ans au nord d'Upernavik. Une fois encore, le spectacle de la glace, de la mer et des lumières du soleil rasant l'horizon est fascinant et ce n'est qu'à 2h du matin, après plus de 14h de marche sans répit, que nous retrouvons notre camp. Après un peu de repos, grande décision. Nous abandonnons l'idée d'aller vers le sud à cause des insectes, espérant en trouver un peu moins vers le nord. Par beau temps, nous rejoignons donc l'île Uilortussoq où les oiseaux font du vacarme toute la nuit.
Autour du camp 3 - 27 Juillet 2009
Front de la calotte vu depuis une balade au-dessus du camp 7 sur l'île Taserssuatsiaup le 5 août 2009
7 au 10 août - L'Upernavik Isfjord
Le lendemain, retour vers l'Upernavik Isfjord et camp installé au fond d'une petite crique bien abritée où nous faisons notre premier feu de camp. Le jour suivant, départ vers l'île Qeqertarssuaq d'où l'on souhaite traverser l'Isfjord. Après une inspection de l'état des glaces à la jumelle nous renonçons à traverser l'Isfjord aujourd'hui car l'autre rive semble bloquée par la glace. Après une visite de la côte nord de l'île, le camp est monté au fond d'une mini crique bien abritée des vagues et inaccessible à marée basse. Lagune d'eau douce et superbe vue sur les icebergs.
Arrivée au camp 3 le 31 juillet 2009.
Nous faisons ensuite une tentative de traversée de l'Upernavik Isfjord. Journée épuisante. Nous essayons de franchir le fjord à deux endroits différents mais c'est impossible car il y a vraiment trop de glace. D'énormes icebergs arrivent sans discontinuer de la calotte située à l'extrémité du fjord et créent une situation dangereuse pour notre petit kayak. Nous renonçons pour aujourd'hui et revenons occuper notre camp.
Le camp 8 sur l'île Uilortussoq le 6 août 2009.
Le lendemain 10 août, nouvelle tentative un peu plus à l'ouest, en direction de l'île Manitsoq où nous avions réussi à traverser dans l'autre sens en 2007. Après avoir cru réussir, nous sommes finalement bloqués tout près de la côte nord par un brash-ice** serré. Retour très fatiguant et camp à l'emplacement précédent. Dîner grandiose face à la calotte mais nous n'avons pas revu le petit renard. Notre échec à franchir l'Isfjord ici confirme nos observations de 2007. Il faut traverser environ 20 ou 25km plus à l'ouest, à hauteur de l'île Sisuarigsut. On se trouve alors à plus de 50km du front de la calotte et la quantité de glace est beaucoup plus faible. Quoi qu'il en soit, c'est décidé, nous repartons vers le sud, espérant que maintenant, la fraîcheur des nuits aura raison des insectes.
11 au 18 août - Les îles du centre et la Terre de Kochs
Pour le second départ vers le sud, temps gris et pluvieux pour la première fois depuis le départ d'Upernavik. Bonne étape avec un petit vent favorable et camp sur l'île Saningassoq. Il pleut toute la nuit mais au matin, le grand beau temps est revenu. Etape sans histoire vers l'île Nako. Nombreux oiseaux: cormorans dont les jeunes ne volent pas encore, miroirs, canards, oies, goélands. La journée du lendemain débute par une séance de pêche aux moules qui sont ici nombreuses et excellentes. Poursuivant vers le sud entre les îles, nous avons parfois des difficultés à trouver de l'eau autour des camps. Dans ce cas, la solution consiste à ramasser des morceaux de glace flottante qu'il est facile de faire fondre.
Béatrice revient de la pêche aux moules au camp 13 sur l'île Nako le 13 août 2009.
Détroit d'Angmarqua et versant ouest de l'île Akuliaruseq vus de la balade au-dessus du camp 20 le 21 août 2009.
Cette glace provient de la calotte et donc constituée d'eau douce. Le camp suivant est situé sur l'île Amarortalik. Le 14 août, départ tranquille avec le vent et le courant favorables en direction de la Terre de Kochs. Celle-ci est profondément entaillée par un chenal étroit de 12km de long que nous remontons entièrement. Le fond du chenal où est installé le camp est un peu décevant avec des hordes de moustiques dans une végétation de saules nains.
Nous rencontrons ici deux bateaux avec des familles inuites venues pour séjourner et pêcher le saumon en tendant des filets à divers endroits de la baie. Le lendemain, après une matinée de repos, nous partons marcher, escortés par une nuée de mouches qui gâchent la balade. Retour anticipé au camp et dîner dans la tente. Quittant vers l'ouest la Terre de Kochs et ses moustiques, nous faisons trois petites étapes en raison d'un vent d'ouest soutenu qui ralentit notre progression.
La côte sud-ouest de l'île Nutarmiut vue depuis une balade au-dessus du camp 25 le 28 août 2009. Au premier plan, le détroit de Sortehul.
Arrêt sur la côte est de l'île d'Ipéraq entre les camps 22 et 23 26 Août 2009.
Trois camps agréables sur la rive sud du Laksefjord, faciles d'accès avec de l'eau. Beaucoup d'oies et de canards le long de notre route. Des familles, affolées par notre arrivée, s'enfuient à la nage car les jeunes ne savent pas encore voler. Le vent d'ouest persiste et la côte nord de Kangeq n'offre aucune possibilité d'accostage sur une distance de 15km.
19 au 22 août – Au sud de l'île Nutarmiut
Nous changeons alors de direction et partons plein nord dans le détroit situé entre les îles Akuliaruseq et Amarortalik. Le 19 août, fort vent d'ouest avec un peu de pluie et camp à l'extrémité nord-est d'Akuliaruseq. Ce sera le dernier jour de temps médiocre avant Upernavik. En effet, dès le lendemain, grand beau temps calme et chaud. Nous contournons l'île Akuliaruseq par le nord avant de rejoindre le sud de l'île Nutarmiut. Pause casse-croûte dans une magnifique calanque de granite rose face aux murailles verticales de l'île Akuliaruseq.
Béatrice navigue dans le détroit d'Angmarqua devant le camp 20 le 20 août 2009.
Le camp 20 - 21 Août 2009
Après déjeuner, nous trouvons l'endroit tellement beau que nous y passerons la nuit. Feu de camp, moules, beaucoup d'oiseaux dans les falaises. La journée du lendemain est consacrée à randonner sur le plateau de 3 ou 400m d'altitude qui forme l'extrémité sud de l'île Nutarmiut. Superbe balade au-dessus de la mer au milieu de blocs rocheux roses et ocres déposés sur ces crêtes par les glaciers. Vacarme incessant des goélands qui préparent peut-être leur migration. Décidément, nous n'arrivons pas à quitter cet endroit et passons une journée supplémentaire à visiter la partie située au nord du camp.
Le camp 21 sur l'île d'Ipéraq le 23 août 2009.
23 au 25 août - L'île d'Ipéraq
Le 23 août, grand beau temps calme. Nous partons vers l'île d'Ipéraq. Un peu de clapot et de houle avec un léger vent de nord-est nous poussent tranquillement vers la côte d'Ipéraq. Après avoir trouvé un point d'accostage pour le kayak, il nous faut monter tout le matériel de camping d'une bonne quarantaine de mètres pour trouver un endroit assez plat pour la tente. Mais la vue magnifique depuis ce camp méritait bien ces efforts.
Le lendemain matin, nous entreprenons l'ascension du sommet de l'île d'Ipéraq (580m). Sans difficulté, elle nécessite cependant un peu de flair pour gagner le plateau sommital. Du sommet où nous passons plusieurs heures, vue magnifique sur l'île Nutarmiut et les grandes parois de la côte ouest de Kangeq. Arrivés à Ipéraq par le nord, nous en repartons par le sud le surlendemain en faisant le tour de l'île. Un peu de houle et de clapot, mais le vent nous pousse et tout va bien. Longeant la côte sud d'Ipéraq, le camp suivant est établi sur la côte est de l'île, au fond d'une crique parfaitement abritée qui serait un bon point de départ pour gagner le sommet d'Ipéraq.
Au sommet de l'île d'Ipéraq le 24 août 2009. Au fond, la côte ouest de Kangeq.
26 au 29 août - A l'ouest de l'île Nutarmiut
Nous sommes le 26 août et devons maintenant revenir vers Upernavik. Pour cela, quittant Ipéraq vers le nord, nous suivons la côte ouest de l'île Nutarmiut et profitons d'un camp paradisiaque au fond de la baie ouverte sur cette côte. Ce camp merveilleux est le plus beau depuis notre départ d'Upernavik. Après une journée de navigation paisible par grand beau temps, le camp est monté dans le fond d'une baie profonde au sud-ouest de Nutarmiut. Le lendemain, départ sur une vraie piscine d'eau calme et claire jusqu'au cap sud-ouest de Nutarmiut, à proximité de l'île Umanaq, où l'on oblique brutalement vers le nord.
La baie de Tasiussaq et le camp 23 dans la soirée du 26 août 2009.
Arrivée au camp 25 dans la baie de Sarqarssuaq le 28 août 2009.
Départ du camp 25 le 29 août 2009.
Soudain, un fort vent de nord-nord-est se lève et nous devons ramer très dur en longeant la côte sud-ouest de l'île Nutarmiut. Nous cherchons un abri mais la côte est ici constituée d'une muraille de 7km de longueur et 600m de hauteur qui interdit tout accostage. Après deux heures d'efforts, nous finissons par gagner l'île Qaersorssuaq. Là, dans le fond d'une petite baie dominée par de grandes parois rouges, nous dressons un camp d'anthologie qui dispute la palme d'or des camps à celui de l'avant veille.
La baie de Sarqarssuaq et le camp 25 au matin du 29 août 2009.
Dans la soirée, le vent se calme, le ciel s'éclaircit et nous pouvons admirer la côte de l'île Nutarmiut que nous avons suivie. Récemment, des grimpeurs de haut niveau ont ouvert ici des voies d'escalade de grande envergure en partant d'un voilier. Après ces émotions, l'étape du lendemain est tranquille avec un camp au bord du détroit situé entre Nutarmiut et Qaersorssuaq. Belle journée calme pour l'avant dernière étape qui se termine à l'emplacement de notre premier camp. A la pause casse-croûte, nous ramassons des moules pour le dernier dîner et goûtons des oursins excellents. Nous croisons un groupe de phoques qui marsouinent gaiement devant des icebergs colorés superbes. Le dernier jour du mois d'août sera aussi le jour de la dernière étape et de notre arrivée à Upernavik.
Iceberg coloré devant le camp 27 le 30 août 2009.
Une fois le kayak et le matériel emballés et mis en caisses, nous confions toutes nos richesses à la Royal Artic Line qui, une fois encore, les a acheminées dans les meilleurs délais. Le 2 septembre, nous quittons Upernavik.
Le premier camp - 29 juillet 2009.
Après avoir effectué un raid magnifique au nord d'Upernavik en 2007, nous avons découvert cette année les superbes îles du sud. Le nord ou le sud, Upernavik est bien une destination parfaite pour un raid d'envergure en kayak de mer d'autant que nous avons bénéficié de conditions climatiques parfaites.
Entre les camps 26 et 27 - 30 Août 2009
Entre les camps 26 et 27 - 30 Août 2009
Notes
*– Isfjord: Fjord dont la partie amont est en contact avec la calotte ou un glacier important qui vêlent des icebergs. Un isfjord est donc plus ou moins recouvert de brash-ice et d'icebergs.
** – Brash-ice: Glaçons flottant sur la mer, de taille décimétrique ou métrique pour les plus importants, provenant de la fracturation des icebergs ou de la dislocation d'une banquise.
Marc Breuil et Béatrice de Voogd ont retrouvé Upernavik avec un immense bonheur du 25 juillet au 2 septembre 2009.
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